Voici deux travaux de Laurence Vaivre-Douret témoignant d'un état de la recherche et de la clinique.
Le premier travail concerne les troubles d’apprentissage non-verbal : les « Troubles d’apprentissage non verbal : les dyspraxies développementales ».
Le second travail est paru dans le Quotidien du Médecin du 7/12/2011: cet l'article du Dr. Béatrice Vuaille présente les trois sous-types de dyspraxie développementale identifiés par l'équipe de Laurence Vaivre-Douret.
L’équipe de Laurence Vaivre-Douret (université Paris-Descartes et AP-HP Cochin, unité INSERM 669) identifie, au terme d'une étude se fondant sur des examens normés standardisés, des sous-groupes permettant un diagnostic plus précis du trouble de l'acquisition de la coordination (TAC) ou de la dyspraxie développementale, avec la possibilité de diagnostiquer des sous-types.
Le TAC touche environ 6 % des enfants entre 5 et 11 ans. Les parents viennent consulter généralement autour de 8 ans, voire 12 ans, après l’acquisition de la lecture, au moment où l’écrit pose problème. La dyspraxie (difficulté d’exécuter des mouvements coordonnés) de l’enfant est alors mise au jour. On trouve des signes de maladresse, de troubles de la coordination globale : quatre pattes et marche parfois tardifs, difficultés pourfaire du vélo, s’habiller seul (boutonner les vêtements. lacer les chaussures, affaires mises a l’envers), manger proprement, faire des puzzles, apprendre a nager. Les problèmes sont souvent mis sur le compte de l’immaturité, d’un défaut d’attention de l’enfant. La dyspraxie développementale peut être à l’origine de difficultés d’apprentissage scolaire : le passage à l’écrit est difficile, la reproduction des figures géométriques pose problème. ll peut aussi y avoir des troubles du comportement, une inadaptation sociale et émotionnelle chez des enfants qui sont par ailleurs intelligents.
« La dyspraxie développementale est un dysfonctionnement neuro- psychologique non verbal, encore trop méconnu ou peu reconnu, aux conséquences cependant non négligeables», explique L. Vaivre-Douret. On a eu tendance à l’associer à l’apraxie de l’adulte, qui est un trouble lésionnel acquis, alors que. chez l’enfant, c’est un trouble du développement.
Comme il n’existe toujours pas de consensus sur la définition de la dyspraxie développementale, l’étude a été entreprise dans l'objectif d’identifier des déficits spécifiques permettant de distinguer des sous-types de TAC et de définir des critères diagnostiques.
Ont été inclus des enfants présentant un TAC selon les critères du DSM-lV-TR.
L’âge moyen des 43 enfants inclus est de 8,3 ans (vus en consultation de pédopsychiatrie à l’hôpital Necker-Enfants malades). Les affections médicales ont été exclues (troubles sensoriels ou visuels avérés, neurologiques ou génétiques), afin de constituer un groupe homogène.
Les enfants de ce groupe ont eu des tests standardisés psychologiques, neuropsychologiques, psychométriques (QI), neuropsychomoteurs et un examen neurovisuel (électrorétinogramme, électrooculogramme).
Deux pures et une mixte. Les résultats montrent que trois groupes de dyspraxies peuvent être distingués. Deux sont des dyspraxies développementales pures : la dyspraxie idéomotrice (lM) et la dyspraxie visuo-spatiale et/ou visuo-constructive (VCS). Le troisième est mixte, associant les deux premiers et incluant des troubles spécifiques de la coordination motrice, voire des déficits cognitifs.
« Le groupe IM est déficitaire (p<0,05) pour les gnosies et les praxies digitales avec une lenteur d'exécution, des gnosopraxies, et sur le plan du contrôle postural, de l'intégration spatiale du corps et de l’oculo-motricité. »
Le groupe VCS, pour sa part, se caractérise « par un déficit (p<0,005) de l'intégration visuo-motrice, de la structuration visuo-spatiale et visuo-contructive, des poursuites visuelles verticales,mais aucun trouble visuel perceptif n'est significatif ».
Le groupe mixte associe les dysfonctionnements lM et VSC, ainsi qu‘une comorbidité d'anomalies cognitives et motrices (adiadoco-cinésie, dextérité manuelle, coordination bimanuelle et dynamique globale, praxies bucco-linguo-faciales).
Cette étude est la première à explorer la sémiologie complète du TAC. « C'est un apport important à la classification internationale (DSM-IV-TR) des TAC», indiquent les auteurs.
Elle va donner lieu à des possibilités de prise en charge, avec la mise en place de stratégies de compensation adaptées. Par exemple, on peut demander à l’enfant de se parlera lui-même pour reproduire le geste, ou bien de le dicter à sa main, ou bien de se l’imaginer avant de le réaliser, selon son trouble.
Dr Béatrice Vuaille
Le Quotidien du Médecin n°9054
7 décembre 2011
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